Vaillantes

Il m’apparaît que avant de se pencher sur le fil conducteur du recueil et la façon d’agencer les textes, il faudrait réfléchir sur le pourquoi du recueil. Qu’est ce que pourrait apporter un recueil par rapport à une simple compilation de nouvelles. Je trouve cette question essentielle mais particulièrement difficile et c’est sans doute, en avançant sur les points suivants que des éléments de réponse se feront jour.

1/ Réfléchir à l’axe principal du recueil

Un premier niveau porterait plutôt sur les contenus (personnages, situations rencontrées, schémas narratifs, lieux…) et un deuxième niveau qui porterait plus sur le type d’écriture, le style, les éléments que l’auteur a choisi de mettre en lumière, les focalisations …)

Avant de me mettre à réfléchir sur le ou les liens existant entre les différentes nouvelles écrites pendant cette formation, je me suis interrogée sur les différents recueils que j’avais déjà lues. Parfois, les liens se situent sur le premier niveau ; ils sont assez évidents comme dans « La loterie et autres contes noirs » de Shirley Jackson où les nouvelles appartiennent à un genre unique. Il y a les nouvelles traversées par un thème , comme le voyage, un pays précis, des types de personnages, un univers particulier.

Parfois, les liens sont moins clairs et relèvent du deuxième niveau. Par exemple, dans le cas de K. Mansfield, c’est plutôt sa façon d’écrire sur presque rien que l’on retient, une espèce d’hésitation partagée par ses personnages, le flou des paysages, des textes saturés d’ éléments impalpables. J’ai achevé les neuf cents pages de son recueil et je serai incapable de dire de quoi ça parle mais je suis persuadée de reconnaître ses textes si je les rencontre à nouveau.

Pour ce qui me concerne, il va de soi que comme il s’agit de nouvelles écrites dans le cadre d’une initiation à l’écriture de différents genres, qqu’il n’est pas possible d’utiliser le critère du genre ; il y a même d’ailleurs une nécessité d’écarter certaines nouvelles où la contrainte du genre prime sur l’histoire (cf la nouvelle pour enfants, la fantasy…)

Il me semble que pour un premier essai et dans le cas d’une auteure inconnue, ce que je suis, trouver un lien assez clair, et donc de préférence au premier niveau, entre toutes les nouvelles faciliterait la rencontre avec un potentiel éditeur.

2/ Faire émerger un fil conducteur

En relisant l’ensemble des nouvelles que j’ai écrites dans le cadre de cette formation, je fais le constat du nombre écrasant d’ héroïnes féminines. Les deux hommes sur les trois personnages masculins étant des meurtriers.

Mon recueil, à un premier niveau de lecture est un recueil qui parlerait de femmes. J’ai voulu parler de femmes qui ont, à mes yeux, un point commun : face à la solitude, à la domination masculine, à l’exploitation capitaliste, au racisme, à la mort, à la peur, à l’absence, à la folie et même à la fin de l’humanité, elles affrontent les difficultés avec courage, avec vigueur. J’ai voulu qu’elles soient touchantes, que le lecteur puisse s’identifier à ces personnages. Ces femmes sont inscrites dans une époque, un lieu de vie, une généalogie. Elles ne restent jamais passives, elles sont portées par des sentiments d’amour, d’amitié et d’humanité. Elles sont pleines de ressources quelque soit la nature de ce qu’elles traversent. Elles sont toujours dans la vie. Il n’y a pas de différence de nature entre l’héroïne qui est confrontée à  une vie ordinaire difficile et celle qui pose un acte héroïque , comme c’est le cas dans le nouvelle sur Rosa Parks. Elles sont fortes  toujours dans la réalité de leur vie. Elles sont vaillantes, à l’image de la jeune fille qui va passer un concours (qui pourrait lui permettre de sortir de la galère elle et son fils) et qui rencontre incidemment son père dans le métro, un père qui ne s’est jamais soucié d’elle. On comprend que la quasi absence de père ne l’empêche pas de mener des projets dans sa vie.

A un deuxième niveau de lecture, les histoires racontent le plus souvent des actes, des évènements de la vie des personnages : un échec, une rencontre, un anniversaire … Il n’y a peu de descriptions, peu de psychologie. C’est dans ce que fait le personnage que le lecteur peut en déduire ce qu’il ressent.

Ma principale préoccupation, lorsque j’écris est de permettre au lecteur d’entrer tout de suite dans le personnage, dans l’instant qu’il est en train de vivre, de ressentir une forme d’empathie instantanée. J’essaie d’écrire simplement, clairement pour qu’il n’y ait pas de problème d’incompréhension entre le lecteur et le personnage. J’y arrive plus ou moins bien …

3/ Le choix des nouvelles

A mon avis, l’ensemble de mes nouvelles ne peut pas convenir au thème général que le titre du recueil « Vaillantes » pourrait incarner. Il faut donc exclure quelques nouvelles et les remplacer par d’autres que j’ai écrites entre temps.

a/ Les nouvelles conservées

* Vaillante : la nouvelle éponyme : une très jeune femme, déjà mère d’un enfant, rencontre son propre père dans le métro avant de passer un concours déterminant pour sa vie future.

Comme c’est une nouvelle brève qui favorise l’entrée rapide du lecteur dans le recueil, je la placerai en premier.

* Pas son genre : une mère de deux enfants, parisienne et divorcée héberge pour la nuit un homme qui vit à l’autre bout de la France et qui au départ, n’a rien qui puisse la séduire si ce n’est l’attirance très forte que lui ressent pour elle.

* Fille unique : une adolescente qui cherche comment se débrouiller avec le monde qui l’entoure et des parents quelque peu défaillants., échoue de manière inattendue à un examen.

* Grandir sa vie : l’histoire de Rosa Parks, la première femme noire a avoir refusé de se lever pour laisser la place à un blanc, racontée à hauteur de cette héroïne humble et déterminée.

* La reine de la fête : une femme simple et généreuse, qui a toujours vécu pour sa famille et surtout pour son fils Robert handicapé, va fêter ses quatre-vingts ans, entourée des membres de sa famille qui se sont tous déplacés pour l’évènement.

* Un monde de requins : une jeune fille, issue d’une famille modeste et qui après des études supérieures en finances aspire à un métier socialement valorisant mais qui se retrouve à faire un travail épuisant et qui va à l’encontre de ses valeurs.

* Attention, chutes de pierres : l’abominable attente d’une mère dont le fils de huit ans, parti faire du vélo n’est pas rentré à la maison.

* La vieille folle et le génome : une femme SDF et perdue dans son délire renvoie à une autre femme qui l’observe, la réalité d’une société inhumaine.

* Le prix de la liberté: une femme, ayant pris l’initiative d’une rupture, se met à développer un sentiment de culpabilité intense qui l’entraîne dans un monde irrationnel.

* On l’appelait Rambo : c’est l’histoire tragique d’une femme qui cherche à se libérer des relations de domination qu’elle subit dans son milieu en rencontrant un autre homme.

* Savoir dire non : une jeune fille se force à accomplir un acte qu’elle ne veut pas faire, sauter à l’élastique par crainte de décevoir son petit ami.

* L’e.treinte : nous sommes à la fin de l’humanité ; deux IA tombent follement amoureux , ils cherchent comment rendre leur relation éternelle.

* Tout doit disparaître : une femme seule passe sa dernière journée dans l’appartement de son enfance. Elle doit le vider, sa mère, trop âgée résidant, à présent dans une ehpad.

Cette nouvelle me semblerait convenir pour clore le recueil car elle évoque à la fois la disparition des êtres mais aussi les histoires générationnelles, l’amour filial qui reste vivant jusqu’au dernier moment.

Certaines de ces nouvelles devront être sans doute un peu modifiées pour mieux « épouser » le thème général.

Il y a 13 nouvelles qui occupent une moyenne de 3 pages et demi. Je pense que ce n’est pas suffisant pour un recueil mais j’ai écrit d’autres nouvelles que je pourrais ajouter.

b/ L’ordre des nouvelles

Quant à l’ordre des nouvelles, j’avoue que je n’ai pas encore eu suffisamment de temps pour y penser. Je pense qu’en avançant sur la question des liens entre les nouvelles et de ce qu’elles s’apportent entre elles, cela m’aidera à avancer dans la structure du recueil.

4/ Quatrième de couverture

Marie Maréchal vous transporte dans la vie de femmes, de tout âge, solitaires ou amoureuses, conformistes ou marginales, énergiques ou hésitantes qui se débrouillent avec la réalité d’un monde dur et d’une vie souvent difficile. Elle nous propose des récits courts portés par un même désir, celui de raconter un moment de la vie d’une femme, des moments de trouble, de chagrin, de joie ou de lucidité qui ont été déterminants dans la poursuite de leur vie.

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